Chronique en cours

Voilà, pour vous tenir au courant de l'état d'avancement de mes (rares) oeuvres littéraires ^^
Je vais poursuivre Le Dernier Combat (sur le DP) là où je l'avais laissé, en explicitant pourquoi le personnage de Judith s'est fait plus discret ces derniers temps.

Si vous avez des idées ou des suggestions, je suis preneuse...

L’inconnu scrutait avec attention le visage lui faisait face.
Le visage, ou plus exactement... l’absence de visage.

En effet, là où des traits distinctifs auraient dû en toute bonne logique se révéler aux regards, une noirceur impénétrable s’était nichée.
L’ample capuchon brun rabattu ne pouvait expliquer à lui seul cette vacuité troublante, davantage rehaussée par un vague scintillement marquant l’emplacement d’improbables prunelles.

Comme dans un rêve, deux mains gantées d’un cuir souple et noir se saisirent délicatement du rabat de toile brune, puis se mirent en devoir de l’attirer infiniment lentement vers l’arrière, dévoilant au passage un masque aussi dépourvu de nez et de bouche qu’il l’était d’expression.

Une cascade de cheveux roux encadra soudain la laque dépourvue d’éclat du visage factice, tandis que les mains gantées se plaquaient contre lui comme si elles s’apprêtaient à recueillir une offrande de larmes de cire.

Mais lorsqu’elles se retirèrent, le masque avait disparu.
A sa place, une peau d’albâtre servait d’écrin à une bouche purpurine finement ciselée, à un nez délicat légèrement retroussé et parsemé de taches de rousseur, ainsi qu’à deux yeux énigmatiques et mobiles d’un noir d’encre.

L’inconnu avança alors une main hésitante - elle aussi gantée - vers ce faciès angélique mêlant à la fois douceur et force de caractère, comme pour le caresser du bout de ses doigts.
Au moment même où ces derniers l’effleurèrent, la belle harmonie de ce charmant visage se rompit, et ses traits se disloquèrent dans une grande ondulation.

Judith plongea sa main dans le bassin naturel empli d’une onde pure comme le cristal, au beau milieu de son propre reflet.

Dans la lumière du matin naissant elle s’aspergea abondamment d’eau fraîche, donnant au mot « ablution » tout son sens (*), puis remit son masque en place avant de l’enfouir à nouveau dans l’obscurité de son capuchon.

Telle devait être sa voie dorénavant : celle du secret et de l’anonymat, après être tombée en disgrâce pour avoir été à deux doigts d’ôter volontairement la vie de sa sœur.
Ce souvenir atroce était à tel point insupportable à l’ex-Archange qu’il lui fouaillait encore les entrailles, et qu’au cours de ses trop brèves heures de sommeil, le fil des événements repassait en boucle devant ses yeux perdus dans le vague.

Elle se mourait.
Dieu la rappelait à Lui, ainsi que le chant ténu de Ses chérubins le laissait présager... Ou bien était-ce seulement le martèlement du sang dans ses tempes ?
Hum, cela était fort improbable. Il ne devait plus lui en rester une once dans les veines après l’hémorragie massive qu’elle venait de subir.

Pourtant, le son persistait.

Elle eut tout le loisir de l’étudier car le temps semblait s’être suspendu, et après mûre réflexion, cela ressemblait davantage à une plainte qu’à un chant.
Judith aurait bien aimé tourner la tête pour en établir précisément l’origine, mais plus un seul de ses muscles ne semblait assujetti à sa volonté.

Soudain, sa vision lui revint aussi brutalement que si quelqu’un avait actionné un interrupteur invisible.

Elle se trouvait sous le ciel ocre d’une atmosphère sulphureuse.
Des nuages d’altitude tirant sur le marron dérivaient loin au-dessus d’elle au gré de turbulences mystérieuses.
La plainte était maintenant toute proche, émanant d’une colonne de créatures à la démarche lente qui s’étendait jusqu’à l’horizon.
Judith remarqua qu’un cliquetis métallique accompagnait le gémissement monotone et, de fait, une gigantesque chaîne entravait ce qui ressemblait à une cohorte sans fin de prisonniers.

(*) Acte rituel de purification du corps par l'eau.

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